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La déposition de croix

 

Saint Sébastien
Déposition de croix
Larron en croix
L'impressionnante Descente de croix de Christian Oddoux, présentée d'abord à la Chapelle de la Salpétrière, à Paris, avant de l'être dans le cellier des moines à Tournus, puis ici, en la Saint-Lazare d'Autun, pourrait paraître à d'aucuns presque sacrilège.

Pourtant, il me semble qu'elle permet de mieux saisir le miracle extraordinaire de la Résurrection, qu'elle oblige à saisir à quel point celle-ci suppose la Toute Puissance divine, car, sinon, comment expliquer que, vingt siècles après l'événement, ce corps disloqué, libéré du gibet, soit celui d'un homme vénéré, mieux adoré par toute la terre ?

Comment n'éprouverait-on pas une immense pitié devant cette masse presque informe, les restes d'un supplicié que l'on fait glisser de la croix sur laquelle il a agonisé, puis expiré ?
Nous sommes à tel point habitués à l'image du Christ en croix que nous ne réalisons plus ce que cette horrible Passion a pu représenter pour celui qui, obéissant à son Père, l'a acceptée et supportée pour nous sauver. Isaïe pourtant l'avait annoncé en des termes d'une force et d'une précision surprenantes : "Objet de mépris, abandonné des hommes, homme de douleur, familier de la souffrance, comme quelqu'un devant qui on se voile la face, méprisé, nous n'en faisons aucun cas. Or ce sont nos souffrances qu'il portait et nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous le considérons comme puni, frappé par Dieu et humilié. Mais lui, il a été transpercé à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes..."

Certes, il existe des expressions dramatiques, terribles même du Christ en croix. Pensons par exemple à celle du retable d'Isenheim au Musée Uterlinden de Colmar.

Mais ici, le drame est achevé. En hâte, avant la Pâque, avec l'autorisation du procureur romain, on dépose le cadavre, dont la mort a été attestée par le coup de lance du soldat, dans un sépulcre proche où il pourra enfin reposer.

La sculpture s'accompagne d'une mise en scène qui en accroît l'aspect tragique et désolé. Tout se réduit à l'essentiel. C'est au spectateur de compléter ce qui n'est même pas suggéré : notamment les têtes, les visages
.
Il faut réfléchir à cet "anéantissement" du Christ dont parle Saint Paul.

Si la résurrection d'un mort est déjà prodigieuse, celle d'un corps écartelé, brisé, broyé tel que l'on entrevoit ici, est plus stupéfiante encore et l'on comprend mieux la peine qu'ont eue les Apôtres à l'admettre, ce que révèlent les divers récits de l'Evangile.

Tout comme les Requiem de Berlioz et de Verdi, la réalisation de Christian Oddoux est assurément théâtrale. Mais, dans tous les cas, on ne saurait nier que ces compositions mettent l'auditeur ou le spectateur devant le fait de la mort et l'enjeu de la mort.
Au reste celle-ci, que notre temps semblerait presque vouloir faire oublier alors qu'elle nous cerne de toutes parts, tient une place importante dans l'oeuvre de Christian Oddoux et cela du corps criblé de flèches de son Saint Sébastien aux Gisants, sans parler de ses Pleureurs qui reprennent dans un langage actuel les figures inoubliables du tombeau de Philippe Pot.

Mais cette mise en scène s'exerce à partir de sculptures d'une grande qualité, d'une connaissance parfaite du matériau utilisé : bois et métal, pierre parfois. Il ne s'agit pas, à l'aide d'effets, de donner consistance à des formes rudimentaires, mais à l'inverse, d'accuser, d'accentuer ce qui, dans le style même et l'essence de l'ouvrage, exprime la réaction d'un homme devant le drame de l'épreuve, de la souffrance.

Même si l'on peut à bon droit envisager d'autres expressions que celles dont use Christian Oddoux, force est de reconnaître la force peu commune de ses sculptures. Comment nier qu'elles traduisent l'angoisse étrange des hommes de notre temps : plus heureux sans doute que l'on étés ceux qui les ont précédés, au moins sur le plan matériel; mais insatisfaits et sans prise sur le destin qu'inexorablement il leur faudra tôt ou tard subir
.

Dom Angelico Surchamp