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Métamorphoses

 

Asra
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Métamorphose. Transformation d’un être en un autre être.

Un tronc d’arbre est un être rencontré au bord d’un chemin. Ou abandonné au fond d’une grange ; un peu plus il allait à la chaudière.

L’être « tronc d’arbre » devient peu à peu sur l’établi un autre être. A la fin du parcours d’un sculpteur sur lui ou en lui ce tronc devenu autre, peut laisser deviner un en - deçà de la forme humaine. Cependant cet en - deçà confronte du même coup à de l’inhumain. Du non humain enfoui au plus profond de l’humain.

Devant chaque tronc il vous faudra deviner seulement : le plus souvent ne sera évoqué que le caractère toujours partiel d’un corps pour laisser au spectateur, au passant, le soin d’une adjonction imaginaire.

Elle apparaît nécessaire, cette adjonction, pour approcher, s’approprier ce qui, sinon, resterait tellement étranger dans une forme qui se voudrait pourtant aboutie. Sans la métamorphose dont vous serez l’auteur cette forme n’appartiendrait qu’au rêve, au monde de celui qui vous la présente pour une première fois. L’auteur attend de vous une manière autre pour la nommer.

Elle dépassera de loin le titre qu’il a tenté d’accoler à son œuvre pour arrêter un cheminement qui sinon allait se fondre dans un abîme. La pièce de bois sculptée est en fin de compte livrée à une nouvelle transformation, celle du spectateur.

Elle vient complémenter celle qui s’est avérée nécessaire au sculpteur pour exprimer « ses confessions » au fil d’une matière silencieuse. La sculpture exposée en tant qu’être attend d’un autre qu’il lui octroie une nouvelle manière d’être.
Cette ultime métamorphose vous la garderez peut être secrète mais elle vous permettra, espère l’artiste, d’aller trouver dans les profondeurs du végétal, les mots qu’il vous faut pour avancer dans le labyrinthe de votre corps intime, de votre « corps propre ». Il vous reviendra d’y découvrir les formes qui vous habitent depuis toujours. Ca n’est vous le savez qu’entre cuir et chair qu’on les trouve. Au seuil de la caresse, dans le sans fond du cri qui surgit avec l’éraflure.

Ces bouts de bois ont besoin, pour retrouver leur mémoire, de la reviviscence que leur redonneront vos fantasmes.

Cette métamorphose leur est donc nécessaire, vitale pour passer enfin à l’état d’une organicité qui n’attendrait plus que l’enveloppe humaine voire inhumaine que vous voudrez bien vous laisser aller à leur donner.

Métamorphose veut dire aussi passage d’une matière à une autre. Le bois deviendra sous la gouge « chair à bois ». L’amoncellement des troncs dans l’affouage ressemblait déjà tellement à un charnier. L’écorce une fois arrachée, apparaît une peau qui laisse entrevoir le mélange des fibres et des veines, des muscles et des os.

Le bois mort doit être aboli pour faire naître du vivant. Il ne s’agit pas d’être arrêté par l’aubier, il s’agit d’aller à la conquête des traces les plus imperceptibles de l’être - arbre, pour les empêcher de rester lettres mortes. Il faut les extraire du plus profond pour qu’elles deviennent l’alphabet d’une autre langue. Un séjour vous attend au bord de cette autre langue. Une autre que la vôtre, une autre que la nôtre, une autre que la mienne. Elle ne comprendrait pourtant qu’un seul mot. Et il ne serait traduisible dans aucune de nos langues. Il permettrait d’ opérer la translation du vraisemblable à l’invraisemblable : métamorphose poinçonnée par l’ éphémère.

Christian Oddoux
Saint Sébastien
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